Publication Parfum des roses

Des chercheurs du LBVpam découvrent que d’anciens virus sont responsables du parfum des roses !Publication scientifique

Des chercheurs du Laboratoire de biotechnologies végétales appliquées aux plantes aromatiques et médicinales (LBVpam – Université Jean Monnet /CNRS1) viennent de faire une découverte étonnante : le parfum des roses serait dû à une suite de hasards qui auraient conduit des virus à changer la fonction d’un gène particulier, responsable du parfum typique des roses. Ces résultats ont été publiés récemment dans Molecular Biology and Evolution.


Roseae - Photo de Jean-Claude Caissard, chercheur au LBVpam

L’histoire commence il y a plusieurs dizaines de millions d’années chez les ancêtres des premières Rosideae, une lignée qui donnera ultérieurement les potentilles, les fraises des bois et les églantiers sauvages. Un gène particulier, le gène NUDX1, s’est multiplié trois fois sur le même chromosome. Ce phénomène, nommé duplication, arrive de temps en temps par erreur lors de la multiplication des cellules.

Ce même gène existe chez les bactéries, chez les mammifères et chez d’autres plantes mais en une seule copie. L’enzyme codée par cette copie unique du gène est impliquée dans l’inactivation de molécules potentiellement mutagènes, c’est même un marqueur de certaines tumeurs cancéreuses chez l’espèce humaine, mais chez les roses, il va prendre une autre fonction.
Le gène NUDX1 s’est donc dupliqué en trois copies chez les ancêtres des Rosideae. Ces ancêtres ont alors évolué jusqu’aux premiers églantiers sauvages en conservant les trois copies du gène. C’est alors qu’un virus s’est probablement attaqué à l’un des églantiers, puis, comme il arrive souvent, le virus s’est installé dans les chromosomes de sa victime pour donner un transposon. Les transposons sont très fréquents dans les chromosomes de toutes les espèces, y compris l’espèce humaine dont les chromosomes sont constitués pour moitié de transposons !

Les transposons n'ont plus d’activité virale mais ont gardé la possibilité de sauter au hasard d’un chromosome à l’autre. Ce faisant, ils peuvent entraîner des gènes avec eux, les dupliquer ou même changer leur fonction. C’est ainsi que sont apparus la couleur rouge des oranges sanguines, les courtes pattes des teckels, ou encore une des protéines indispensables à notre vision. Chez un des églantiers, lors d’un saut, ce transposon a entraîné avec lui une des trois copies de NUDX1 sur un autre chromosome. Le hasard a voulu que cette copie se retrouve à côté d’un autre transposon, différent du premier. L’interaction entre le transposon et la copie de NUDX1 a eu deux conséquences : l’enzyme s’est mise à fonctionner uniquement dans les pétales et elle s’est mise à fabriquer une molécule odorante majeure du parfum des roses.

Cette molécule odorante a été importante dans l’évolution des roses sauvages en lui garantissant probablement une pollinisation par des insectes, comme les abeilles par exemple. Cette copie de NUDX1 s’est alors à nouveau dupliquée ; on trouve ainsi des roses sauvages avec 4, 5 ou même 10 copies de ce gène, garantissant ainsi des productions records de molécules odorantes, ce qui confère aux roses leur parfum si particulier.

Pour lire l'article : doi.org/10.1093/molbev/msac002

1 Le Laboratoire d'écologie des hydrosystèmes naturels et anthropisés (LEHNA, CNRS/ENTPE/Université Claude Bernard Lyon 1) a également participé à ces résultats.

 

Contact chercheur :

Jean-Claude Caissard, enseignant-chercheur au LBVpam (UJM - CNRS) : jean.claude.caissard@univ-st-etienne.fr
univ-st-etienne.fr/fr/lbvpam.html

 

Publié le 25 mars 2022