Journée d'étude « Quels outils théoriques pour penser la domination adulte ? »

[CELEC] - Journée d'étude « Quels outils théoriques pour penser la domination adulte ? »

Université Jean Monnet Saint-Étienne
Département d’Études Politiques et Territoriales (DEPT)
Bât. Michelet - 77 rue Michelet - Amphi 001

Le concept de « domination adulte », présenté par Bonnardel en 2015, met en lumière une forme de domination jusque-là peu théorisée ni même envisagée comme telle : celle qui caractérise les rapports de pouvoir entre adultes et enfants. Entre « âgisme », « adultisme » et « domination », sur quels concepts s’appuyer pour décrire les réalités vécues par les enfants dans nos sociétés ?

 

 

 

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COORDINATION SCIENTIFIQUE

Céline JEANNOT PIÉTROY
(celine.jeannot @ univ-st-etienne.fr)
MCF Sciences du langage,
UJM Saint-Étienne
Grâce RANCHON (grace.ranchon @ univ-st-etienne.fr)
ATER, UJM Saint-Étienne

 

  •  La publication en France en 2015 de l’ouvrage d’Yves Bonnardel « La domination adulte, l’oppression des mineurs » jette un pavé dans la mare en mettant en lumière une forme de domination jusque-là peu théorisée ni même envisagée comme telle : celle qui caractérise les rapports de pouvoir entre adultes et enfants. En effet, ces relations peuvent être interprétées comme des rapports sociaux de pouvoir invisibilisés par un effet de naturalisation (Guillaumin, 1978). L’idée d’une oppression généralisée exercée par les adultes sur les enfants est d’abord théorisée aux États-Unis par le psychologue Jack Flasher (1978). Celui-ci introduit la notion d’« adultisme » définie comme désignant le pouvoir que possèdent les adultes sur les enfants. Cette notion sera reprise et discutée pour la description d’un fonctionnement social adulto-centré dans le cadre des Childhood Studies. En France, si la question des rapports sociaux de pouvoir au sein de l’espace privé ou de la famille fait depuis plusieurs décennies l’objet de travaux (notamment Delphy, 2001), celle des rapports adultes-enfants reste peu explorée ou traitée comme un épiphénomène dans des travaux portant sur le genre et le patriarcat ou sur la violence envers les enfants (Maurel, 2012 ; Delanoë, 2017). Dans son analyse de la domination masculine, Bourdieu écrivait que « l’effet de la domination symbolique ne s’exerce pas dans la logique pure des consciences connaissantes, mais dans l’obscurité des schèmes pratiques de l’habitus, où est inscrite, souvent inaccessible aux prises de conscience réflexive et aux contrôles de la volonté, la relation de domination » (1990 : 11). Si l’on postule qu’il en est de même pour la domination adulte, un travail d’analyse et de déconstruction est donc nécessaire pour faire sortir de l’obscurité les rouages de ce système afin de le mettre au jour et de la rendre accessible à la conscience. Un premier pas dans cette entreprise consiste à explorer les concepts clés permettant d’aborder le phénomène. Au sein des sciences humaines et sociales, plusieurs disciplines sont ainsi susceptibles de fournir des outils théoriques, parmi lesquelles les études sur le genre et la sociologie de l’enfance. Le propos de cette journée d’étude est d’explorer le potentiel des concepts de domination, d’adultisme, d’inégalités liée à l’âge, d’ordre générationnel, parmi d’autres, pour décrire et comprendre les fonctionnements qui régissent les relations de pouvoir entre adultes et enfants dans les différentes sociétés humaines.



    Références
    Bonnardel Yves, La Domination adulte, l’oppression des mineurs, Éditions Myriadis, 2015.
    Bourdieu Pierre, « La domination masculine », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 84, Masculin/féminin-2, 1990, p. 2-31.
    Delanoë Daniel, Les Châtiments corporels de l’enfant. Une forme élémentaire de la violence, Éditions Érès, 2017.
    Delphy Christine, « L’état d’exception : la dérogation au droit commun comme fondement de la sphère privée », L’Ennemi principal. 2/ Penser le genre, Syllepse, 2001, p. 195-196.
    Flasher Jack, « Adultism », Adolescence 13 (51), 1978, p. 517-523.
    Guillaumin Colette, « Pratique du pouvoir et idée de Nature. (2) Le discours de la Nature », Questions féministes, n° 3, 1978, p. 5-28.
    Maurel Olivier, La Violence éducative : un trou noir dans les sciences humaines, Éditions l’Instant Présent, 2012.