Ecologie - Florence Nicolè

FLORENCE NICOLEEt si les plantes pouvaient parler ...

C’est en banlieue parisienne qu’a grandi Florence Nicolè, chercheuse en écologie au LBVpam de l’UJM.
Dans cet environnement très urbain, elle est dès l’enfance attirée par la nature.
« J’étais toujours dans notre petit carré de jardin, les mains dans la terre ; je plantais. Je faisais des élevages de punaises, d’escargots… Les week-ends, nous allions aux bois de Vincennes et je creusais, je collectais des bouts de bois et collectionnais les feuilles, je regardais les arbres… ».

© Florence Nicolè

Dès le collège, Florence Nicolè sait qu’elle veut faire de la biologie. Bonne élève, elle obtient un BAC S et hésite entre l’université ou un parcours d’ingénieur qui lui semble plus concret, plus rassurant. Souhaitant travailler en autonomie, elle choisit de s’inscrire en DEUG de Biologie à l’Université de Créteil mais sans vraiment savoir vers quel métier cela va l’amener. En deuxième année, elle effectue un stage volontaire durant l’été dans un laboratoire de recherche et se passionne pour les approches expérimentales. Elle a trouvé sa voie mais sans encore oser se l'avouer.

Issue d’une famille ouvrière et de parents autodidactes, le monde de la recherche ne lui paraît pas à sa portée. C’est par son travail qu’elle va tracer son chemin. Il lui faut avoir d’excellentes notes pour pouvoir intégrer l’université parisienne Pierre et Marie Curie. Florence ne ménage pas ses efforts et commence sa Licence dans cette université où elle va enfin pouvoir étudier ce qui la passionne depuis toujours : les interactions entre les êtres vivants. Major de sa promotion, elle est acceptée en DEA d’écologie et choisit un sujet de recherche plutôt novateur : La sauvegarde des plantes menacées. Elle développe des modèles pour préserver l’emblématique orchidée sauvage des Alpes, le Sabot de Vénus.  Ce stage basé à Grenoble est certes, un moyen de prendre un peu d’autonomie, mais surtout, l’opportunité d’être plus en prise avec la nature.
Elle se passionne pour ce sujet et demande un financement régional qu’elle obtient pour poursuivre une thèse intitulée « Biologie de la conservation appliquée aux plantes menacées des Alpes » qu’elle soutiendra à Grenoble en 2005.
Durant ces années de thèse, elle pourra compter sur le soutien de sa directrice de recherche, Irène Till-Bottraud, pour la guider dans le monde de la recherche. C’est elle qui va l’aider à s’intégrer dans des réseaux de chercheurs. « La recherche n’est pas un travail solitaire, c’est beaucoup d’interaction, de coopération, de partage de connaissances »,  explique-t-elle.

S’ÉMERVEILLER DE LA NATURE POUR LA PRÉSERVER

Après sa soutenance de thèse, Florence intègre le Laboratoire de Biotechnologies Végétales appliquées aux Plantes Aromatiques et Médicinales (LBV-pam) de Saint-Étienne en 2006 sur un poste d’ATER avant de devenir enseignante-chercheuse en 2007. Elle choisit de rester à Saint-Étienne étudier la communication chimique des plantes plutôt que de prendre un poste équivalent à Nice pour étudier la conservation des algues méditerranéennes.

Elle aime être sur le terrain pour observer les plantes dans leur environnement, comprendre comment elles interagissent avec les autres organismes. « J’ai besoin de comprendre la nature et de pouvoir la faire comprendre aux autres. Les faire s’émerveiller comme moi je m’émerveille », confie-t-elle.


© La Fabrique du Film

L’émerveillement est un sentiment permanent pour Florence dans son métier. Faire de nouvelles découvertes notamment sur la communication des plantes. Entrevoir qu’elles sont capables de s’entraider, d’avoir de la mémoire, de communiquer les unes avec les autres… De nouvelles preuves scientifiques de leurs facultés sont régulièrement publiées. Beaucoup de découvertes sont encore inexplicables et c’est bien cela qui lui donne envie de continuer à essayer de comprendre.« Les travaux récents montrent que les plantes ont une vingtaine de sens et nous, nous en avons cinq !»,  s’exclame-t-elle.  « Être mobile nous rend bien moins sensible à notre environnement. Quand les conditions ne sont pas favorables, nous utilisons la fuite ; les plantes ne le peuvent pas. Les humains perdent progressivement leurs liens à la nature. Nous pensons que nous pourrons fuir vers une autre planète quand il n’y aura plus rien sur celle-là » ironise-t-elle. Pour Florence, chercher à comprendre cette hyper-sensibilité des plantes, c’est remettre l’humain à sa juste place, comme un maillon de la chaine. Les plantes survivront sans les humains, pas l’inverse.


© Florence Nicolè

Ses convictions, elle les partage au sein du Conservatoire National des Plantes à Parfum, Médicinales et Aromatiques dont elle est la vice-Présidente. Cette association œuvre à la préservation de la diversité de toutes les plantes utilisées par les humains.

Florence aime transposer ses approches de traitement de données à d’autres thématiques de recherche. Elle apporte notamment son expertise sur le projet TARA, pour comprendre pourquoi les coraux disparaissent. Elle travaille aussi avec l’Equipe de Neuro-Ethologie Sensorielle sur l’analyse des vocalisations des lagopèdes, des bonobos et la diversité acoustique des environnements.

ÊTRE FEMME ET CHERCHEUSE : PAS TOUJOURS FACILE…

Dans son métier de chercheuse, Florence se donne pour missions de produire de la connaissance avec rigueur et éthique, de proposer de nouveaux paradigmes, de former des étudiants et de leur donner confiance en eux. De son histoire personnelle, elle garde l’envie de diffuser le savoir, et de rendre l’université et le monde de la recherche accessibles à tous.

« J’aime l’autonomie que nous avons dans la recherche mais elle est à double tranchant ».  
Dans la recherche, il faut être reconnue de ses pairs. Pour cela, il faut créer des réseaux de collaboration, obtenir des financements, encadrer une équipe, mener et répliquer les expériences, publier les résultats de ses recherches dans des revues scientifiques reconnues et présenter ses travaux lors de conférences nationales et internationales. Tout cela demande beaucoup d’investissement, de temps et des déplacements… Difficile à concilier avec sa vie familiale et l’enseignement universitaire.

Maman de deux enfants, Florence avoue avoir été souvent tiraillée entre sa vie de maman, sa vie personnelle, et sa vie professionnelle. Et cette complexité tient beaucoup au fait que son travail est une passion. Comme toute passion, il est parfois difficile de définir les limites et de ne pas déborder sur la sphère personnelle. En réalité, ce serait contre sa nature de ne pas partager sa passion des plantes avec ses enfants. Elle leur montre ce qu’elle fait, les recherches menées et les amènent à se questionner et à respecter tous les organismes vivants.

Aujourd’hui, Florence semble avoir trouvé un équilibre entre ces deux sphères de sa vie si inextricablement mêlées. Se définissant comme une écologue plus qu’une biologiste, elle continue à étudier les interactions du vivant et à partager avec nous, et pour notre plus grand plaisir, les secrets des plantes.

Découvrez le projet de recherche de Florence Nicolè
en vidéo, par la Fondation UJM