Julie FaivreResponsable de gestion financière
Un cursus scientifique
Originaire de l’Aveyron, le parcours de Julie n’était pas destiné à la mener au métier qu’elle exerce aujourd’hui.
Au collège, elle apprécie les sciences et obtient de bons résultats, qui lui permettent d’envisager un cursus scientifique. Intéressée par le domaine de la pharmacie, elle passe un baccalauréat scientifique et tente le concours de pharmacie. Malheureusement, elle ne parvient pas à le décrocher et s’oriente alors en faculté de biologie à Montpellier, où elle rencontrera son futur époux, ce qui la conduira à rejoindre la région de Saint-Etienne.
Après un DEUG de biologie et une licence de physiologie, Julie passe une maîtrise en biologie-physiologie, spécialité microbiologie, ainsi qu’une maitrise professionnelle en biotechnologies.
Après un stage d’un an à Lyon, dans une entreprise de fabrication de peau reconstruite pour les tests cosmétiques (Episkin), elle est engagée à un poste de production. Mais l’aspect « production » lui plaît moins que la recherche qu’elle avait touchée du doigt en stage. Julie décide donc de quitter l’entreprise et rejoint l’Université.
Sa première expérience universitaire prend alors la forme d’un poste de technicienne au laboratoire de neurobiologie Synatac de l’Université Jean Monnet. Elle y travaille sur le développement de milieux de culture pour des études sur la dégénérescence des neurones.
« J’ai beaucoup aimé Saint-Etienne. Contrairement à Lyon, c’est une ville à taille humaine qui m’a donné envie de m’y installer. J’ai toujours eu un bon sentiment d’intégration ici. »
Après un temps, la vie personnelle de Julie évolue : la famille s’agrandit avec l’arrivée de ses enfants, et sa carrière passe alors au second plan et devient plus alimentaire. Entre le peu de postes disponibles dans son domaine et son choix personnel de rester sur Saint-Etienne, il devient compliqué de trouver un emploi qui lui convienne.
C’est alors qu’elle envisage de se reconvertir et commence à se questionner.
Julie se rappelle avec amusement qu’un test passé en 3e, au moment où elle s’intéressait aux cursus scientifiques, prédisait des aptitudes pour les travaux administratifs. Peut-être était-elle prédestinée à ce métier qui marie sciences et administration ?
Une reconversion sur le fil rouge des sciences
Julie décide alors de « repartir à zéro », et de passer les concours administratifs.
Cette décision est difficile au départ. Il faut faire le deuil de sa carrière scientifique, et les concours représentent une très grande quantité de travail qu’il faut faire concorder avec sa vie de famille.
« Ça s’anticipe, ça ne s’improvise pas. J’ai eu la chance d’avoir un conjoint qui a pris le relais avec les enfants pour me permettre de prendre du temps pour ce travail. ».
Une fois le concours obtenu, Julie a de nouveau un choix à faire. Elle a la possibilité d’intégrer une mairie ou un collège, mais elle fait le choix de rester dans l’enseignement supérieur et la recherche. Une façon de rapprocher ses études et ses nouvelles compétences. Et son passé scientifique est loin d’être perdu !
« Le fait d’avoir été de l’autre côté, je comprends mieux les attentes de la recherche, et ça donne du sens à ce que je fais. »
Sa carrière administrative commence en 2007 à Lyon et se poursuit en 2008 à Telecom Saint-Etienne (à l’époque ISTASE) sur un poste d’adjointe administrative. Au fil des concours qu’elle réussit (catégorie C, B puis A), elle travaille à la faculté de médecine, puis à la faculté des sciences. Elle décrochera enfin le concours d’ingénieure d’étude et occupera, à partir de 2018, le poste de responsable de gestion financière à la faculté des sciences de l’Université Jean Monnet.
Julie a bâti sa carrière elle-même, mais sait l’importance des rencontres qu’elle a faites : « Sur mon premier poste à l’Université de Lyon, j’ai fait la rencontre d’un responsable service financier qui m’a tout expliqué. Il a partagé son métier mais aussi sa passion. »
Responsable de gestion financière, Julie se considère comme une facilitatrice de la mise en musique des travaux de recherche. Elle travaille avec les chercheurs pour analyser leur projet, et leur faire des propositions de gestion financière (sur le plan de dépenses pour les recrutements, les achats d’investissement…). Bien au-delà de ses compétences techniques financières, ce sont de réels conseils et un accompagnement précieux que Julie apporte aux laboratoires de recherche. Elle est aussi souvent responsable de réaliser les démarches auprès des différents contacts (marchés, fournisseurs…).
Pour cela, Julie peut compter sur ses connaissances, ses compétences, mais aussi son réseau.
« J’aime beaucoup ce métier, parce que je touche à tout et je travaille avec plein de services différents de l’université. On a tendance à réduire ça à de la comptabilité, mais je travaille en réalité avec le service des marchés publics, l’agence comptable, la direction de la recherche, des partenariats, les ressources humaines… On est un maillon de la chaîne, on a besoin du travail des autres pour bien faire le sien. Et comprendre ce que font les autres, ça donne du sens à ce que l’on fait ».
Et ce travail en réseau est au cœur du métier de Julie :
« On doit aussi imbriquer les demandes des chercheurs dans les règles financières, comptables et juridiques pour que le projet soit réalisé au plus proche de leurs attentes mais dans le respect des règles. On fait jouer nos compétences et nos contacts pour tout harmoniser. C’est très enrichissant : ça me nourrit, je rencontre plein de personnes différentes. »
Ce qui plaît à Julie dans son métier, c’est la diversité de missions qui lui permettent d’avoir la vision complète des projets, avec des échanges sur toute leur durée avec les chercheurs.
« C’est un domaine dans lequel je me suis épanouie en tant qu’étudiante et dans lequel je m’épanouis dans mon métier. C’est notre avenir ! Pasteur et Marie Curie ont bercé mes rêves au départ et aujourd’hui je suis dans cet environnement d’une manière différente. »
Un autre aspect qui est moteur pour elle, c’est la dimension d’adaptation que demande ce métier. Puisque les outils et les demandes évoluent constamment, Julie doit s’adapter, ajuster ses méthodes, se former et apprendre en permanence.
De plus en plus, l’opposition administration / recherche s’est estompée, et Julie a gagné la confiance de ses collaborateurs des laboratoires. Si les responsables de gestion financière étaient au départ perçus comme les simples « garde-fous de la dépense », du fait de la mission de contrôle qui leur incombe, elle se sent maintenant perçue comme une vraie partenaire de projet sur laquelle on peut s’appuyer.
Aujourd’hui, ses liens avec les chercheurs et les services centraux sont un relais de proximité précieux qui facilite les demandes et les échanges.
La refonte récente de certains campus de l’Université Jean Monnet, qui a éloigné plusieurs laboratoires des locaux administratifs, a fait perdre à Julie un peu de cette proximité. Mais toujours dans une volonté d’adaptation, elle entend bien repenser son mode de fonctionnement pour continuer de garder un lien privilégié avec les chercheurs de ces laboratoires plus éloignés.
Une administration très féminisée
En France, les métiers administratifs sont très féminisés. Dans l’équipe de Julie, on compte cinq femmes pour un homme. Dans les universités françaises, les femmes représentent 60% des personnels de soutien à la recherche. Et cette proportion retombe à 40,6% lorsqu’on s’intéresse aux postes de directrices générales des services (DGS).
Julie nous confie avec émotion :
« J’ai eu la chance en arrivant à l’université d’avoir une responsable administrative qui m’a toujours boostée et qui m’a donné confiance en moi. Elle m’a poussée à passer les concours et à croire en moi ».
Bien sûr, il existe aussi des aspects du métier que Julie apprécie moins. Elle cite notamment la frustration d’une charge de travail trop importante pour parvenir à tout faire
Elle a choisi, à l’arrivée de ses enfants, un contrat à temps partiel à 80%, qu’elle a conservé par la suite. Mais malgré cette réduction de temps de travail, Julie confie que la charge réelle de travail équivaut en réalité toujours à un temps plein, ce qui génère parfois la frustration de ne pas réussir à faire tout ce qu’elle souhaiterait.
En France, huit emplois à temps partiel sur dix sont occupés par des femmes. De plus, il existe une différence dans les raisons de ces temps partiels. Ceux-ci répondent plus généralement à des motivations familiales pour les femmes (grossesses, gestion des enfants, du foyer), et professionnelles pour les hommes (autre emploi en parallèle, formation, études).
Faire des choix, pour s’épanouir ailleurs
La carrière de Julie, ce sont des choix, parfois difficiles, car ces derniers sont le fruit de compromis entre vie professionnelle et vie personnelle. Malgré tout, aujourd’hui, Julie est épanouie et heureuse dans son métier, qui lui permet de garder du lien avec les sciences et de contribuer à sa manière à la recherche.
Selon elle, les études universitaires ont évolué, et donnent aujourd’hui plus de clés aux étudiants quant à leur orientation qu’elle n’a pu le constater lorsqu’elle était étudiante. A ce moment-là, elle n’avait pas connaissance du fonctionnement et de l’environnement de la recherche sur le plan des carrières et des recrutements.
« Il y a énormément de façons de contribuer à la recherche, il n’y a pas que les chercheurs. Il y a les ingénieurs, les techniciens, les doctorants, les post-doctorants… c’est une variété de personnes qui enrichit cet écosystème. »
Parmi ses missions, Julie est aussi chargée de la formation de nouveaux collaborateurs, auprès desquels elle exerce un « management de proximité ».
« Je suis proche de mon équipe, j’échange avec eux au quotidien pour les accompagner, les mettre à l’aise et leur permettre de maîtriser leur métier et de s’y épanouir. »
C’est un aspect qu’elle apprécie particulièrement. Une occasion à son tour de montrer que même si l’on n’est pas formé au départ, on peut découvrir, et réussir.