Thomas LapolePhysiologiste
Parcours
« J’ai toujours voulu travailler dans le sport. Au collège j’hésitais entre prof d’EPS et restaurateur. J’ai fait mon stage en restaurant et même si j’ai beaucoup aimé, je suis resté sur l’idée d’enseigner le sport. »
Après une expérience en tant qu’entraîneur de tennis (et plus tard de VolleyBall), Thomas entre en STAPS avec la volonté de devenir professeur d’EPS. C’est dans ce parcours qu’il découvre les sciences de la vie appliquées au mouvement, et notamment la physiologie qui l’intéresse beaucoup.
C’est l’opportunité d’un master recherche en physiologie et physiopathologie qui détourne Thomas de la voie de l’enseignement d’EPS et le conduit sur celle de la recherche.
« Ça a vraiment été une révélation, et j’ai très vite dit à ma professeure de physiologie que mon but dans la vie, c’était de prendre sa place ! ».
Ce parcours, réalisé à Amiens dont Thomas est originaire, lui a permis d’accéder à une thèse puis à un poste d’ATER et enfin un post-doctorat.
Il arrivera en 2012 à Saint-Etienne pour intégrer l’Université Jean Monnet et le LIBM. Il aura l’occasion de diriger le département STAPS, puis le LIBM.
Recherche sur l’activité physique
Maître de Conférences à l’UJM depuis 2012, Thomas travaille au département STAPS de l’UFR Sciences et techniques où il enseigne la physiologie de la licence au master et réalise ses recherches au LIBM (Laboratoire Interuniversitaire de Biologie de la Motricité) dont il dirige l’équipe stéphanoise.
Le LIBM, à travers 6 équipes de recherche, étudie l’effet de l’activité physique sur l’organisme, et cherche à améliorer la performance des sportifs de haut niveau (optimisation de l’entraînement, prévention des blessures, …). Il s’intéresse aussi à l’utilisation de l’activité physique pour améliorer au quotidien la santé et la qualité de vie des personnes saines comme pathologiques.
« Le sport, c’est une activité codifiée qui a pour but d’aller rechercher une performance physique. L’activité physique, c’est passer la tondeuse, aller faire ses courses à pied, être simplement actif au quotidien. »
Thomas travaille particulièrement sur la partie « activité physique » et ses alternatives.
« On sait qu’il faut être actif pour être en bonne santé, et que l’inactivité entraîne un déconditionnement : les muscles fondent, et le système nerveux perd aussi en efficacité, et ne parvient plus à correctement activer les muscles. En cas d’hospitalisation prolongée suite à un AVC, une opération chirurgicale, un séjour en réanimation… le patient immobilisé risque un fort déconditionnement. Puisque sa situation ne lui permet pas de pratiquer une activité physique pour limiter ce déconditionnement, j’essaye de trouver des stratégies alternatives à l’activité physique pour ces personnes. »
Thomas travaille principalement sur la technique de la vibration musculaire : une vibration (stimulation mécanique) est appliquée sur le muscle, pour reproduire l’activation de récepteurs musculaires, comme celle que l’on retrouverait lors d’un mouvement réel.
On stimule donc artificiellement le système nerveux via cette vibration pour le maintenir « éveillé » et capable d’activer les muscles.
Ces recherches étudient dans quelle mesure l’activation de ces récepteurs musculaires permet de maintenir le fonctionnement optimal du système nerveux lié à ces mouvements, très impacté par ces périodes d’immobilisation.
A ce jour, peu de patients sont traités avec cette méthode, mais les résultats d’études préliminaires menées sur le site du CHU de Saint-Etienne sont très encourageants.
Et puisque ces études se font sur le corps humain, chacune doit être validée par un comité éthique :
« C’est un point délicat pour nous, c’est bien sûr obligatoire, mais cela demande beaucoup de temps et d’énergie. Le CHU est un grand appui pour ces dossiers, mais il est vrai que le temps écoulé entre la demande d’autorisations éthiques et le démarrage réel du projet avec les premières inclusions est très long, de l’ordre de 6 mois à 1 an. »
Vie de chercheur
Ce métier de chercheur offre de nombreux aspects positifs que Thomas décrit, en commençant par la grande liberté qu’il offre.
« J’aime bien l’idée d’être maître de ma trajectoire. On mène sa barque, on définit sa propre orientation, les travaux que l’on veut mener. Ce sentiment de maîtrise est vraiment agréable. »
Et ce à la fois sur le contenu des travaux, mais aussi sur la gestion de son temps de travail.
« Il n’y a pas de routine, on fait beaucoup de choses différentes dans une même journée. »
Les découvertes, la nouveauté et l’ouverture sur l’extérieur sont aussi des points forts, chers à Thomas dans l’exercice de son métier.
« On découvre plein de choses, plein de nouvelles personnes, on en apprend toujours. Ça nous tire vers le haut. On voyage beaucoup, c’est aussi ce qui fait l’attrait de ce métier. Aller discuter avec des collègues chercheurs un peu partout dans le monde, pour des collaborations ou des congrès, c’est très intéressant. »
Au revers de la médaille, Thomas cite les tâches administratives, d’autant plus lourdes lorsqu’on dirige le laboratoire.
Il confie également que le statut d’enseignant-chercheur, qui apporte une grande richesse et dont il apprécie les deux moitiés, est parfois difficile à articuler :
« Être à la fois bon dans l’enseignement, dans l’administratif et dans la recherche, c’est assez difficile. On ne peut pas toujours tout bien faire quand on jongle entre toutes les tâches. Ça casse la routine, ça permet de prendre du recul, et de donner du sens à ce que l’on fait, mais en même temps on a du mal à aller au fond des choses. »
Un dernier point que relève Thomas concerne le système de publications dans la recherche scientifique :
« Il y a de plus en plus de revues prédatrices, le travail de reviewer* est très peu valorisé, et l’accès est parfois difficile sur certaines connaissances scientifiques du fait du système économique des revues scientifiques. On a tous envie de se diriger vers la Science Ouverte, mais dans la pratique ce n’est pas toujours évident. »
* les reviewers sont les scientifiques qui relisent et corrigent les articles de leurs pairs, pour favoriser des publications de qualité. Tous les chercheurs peuvent être amenés à être reviewers pour un ou plusieurs articles dans leur carrière.
Aujourd’hui, Thomas prend plaisir à évoluer dans son domaine, qui lui permet de donner du sens à son travail.
« J’ai aimé accompagner des projets sur des sujets atteints de paralysie cérébrale, dans le but d’optimiser leur prise en charge. Ça permet de donner du sens à son travail en essayent d’aider les patients, d’améliorer leur qualité de vie. »